Procédures

Les règles générales

La Cour des comptes exerce ses compétences dans le cadre d’un programme annuel qu’elle adopte librement. Elle peut, en outre, effectuer des vérifications ou enquêtes sur demande du Président de la République, du Gouvernement ou du Parlement. Ses investigations sont secrètes.

Elle procède par écrit et de manière contradictoire. Les personnes concernées sont toujours mises à même de présenter leurs observations ou moyens de défense, avant toute conclusion définitive. Cela se traduit pour les jugements, par un arrêt provisoire puis un arrêt définitif et pour les rapports par un rapport provisoire puis un rapport définitif.

La Cour dispose du droit de communication. Ainsi, elle est habilitée à se faire communiquer tous documents ou informations utiles relatifs à la gestion soumise à son contrôle. Le secret professionnel n’est pas opposable aux magistrats et rapporteurs de la Cour et ceux-ci ont un droit d’accès direct et permanent au sein des organismes où ils sont en mission.

Toute entrave à ces prérogatives est punie d’amende et éventuellement de sanctions administratives ou pénales.

A la différence des autres corps de contrôle, ses vérifications ne portent que sur les gestions budgétaires ou exercices financiers clos.

La procédure relative au jugement des comptes

1 La production des comptes

A la clôture de chaque gestion et après le délai fixé par la loi, les comptables principaux de l’Etat, des collectivités locales et des établissements publics doivent transmettre à la Cour des comptes leur compte de gestion, appuyé des pièces générales et de pièces justificatives des recettes et des dépenses qu’ils ont effectuées durant la période écoulée. En cas de succession de comptables en cours de gestion, le compte entier est rendu par le comptable en fonction à la clôture de la gestion.

Le retard dans le dépôt des comptes au greffe central peut être sanctionné d’une amende de 50.000F par mois de retard, à l’encontre du comptable concerné.

2 L’instruction des dossiers

Le président chambre répartit les dossiers de sa compétence entre les magistrats de la chambre. D’autres rapporteurs peuvent également être désignés en concertation avec les présidents des chambres auxquelles ils appartiennent.

Les rapporteurs procèdent à la vérification des comptes sur la base des pièces générales et des pièces justificatives de recettes et de dépenses et élaborent ensuite un rapport à fin d’arrêt et un projet d’arrêt provisoire présentés à la chambre.

3 L’arrêt provisoire

La Cour rend un arrêt provisoire par lequel elle enjoint, s’il y a lieu, au comptable d’apporter des justifications sur des constatations valant charges. Le comptable dispose d’un délai maximum de deux mois pour répondre aux observations et injonctions de l’arrêt provisoire.

Le retard du comptable dans la production des justifications peut être sanctionné dans l’arrêt définitif par une amende de 100 000 F au maximum par injonction et par mois de retard injustifié (article 36 de la loi organique).

4 Le jugement définitif des comptes

Dès que l’affaire est complètement instruite, la chambre rend un arrêt définitif. Si le compte est reconnu régulier, la chambre rend un arrêt de décharge à l’égard du comptable demeuré en fonction ; à l’égard du comptable sorti de fonction, elle rend un arrêt de quitus qui donne mainlevée de toutes les sûretés et garanties grevant les biens du comptable au profit du trésor public.

Si le compte est irrégulier par défaut (déficit ou paiement irrégulier), l’arrêt le déclare en débet « . Le débet fait obstacle à la décharge du comptable jusqu’à ce qu’il soit apuré.

 » La décharge de responsabilité résultant d’un cas de force majeure ou la remise gracieuse des débets peut être accordée par arrêté motivé du ministre chargé des finances, après avis conforme de la Cour des comptes (article 25 du décret n° 1449 précité) « .

La Cour juge en premier et dernier ressort sous réserve de pourvoi en révision devant elle ou en cassation devant la Cour suprême.

La procédure relative à la gestion patente est applicable également à la gestion déclarée de fait.

 

Le contrôle non juridictionnel ou contrôle de la gestion

1– Objet

Le contrôle non juridictionnel de la Cour des comptes vise à apprécier la qualité de la gestion et à formuler, éventuellement, des suggestions sur les moyens susceptibles d’en améliorer les méthodes et d’en accroître l’efficacité et le rendement.

Ce contrôle englobe tous les aspects de la gestion. La Cour apprécie la réalisation des objectifs assignés (efficacité), l’adéquation des moyens utilisés (efficience), les coûts des biens et services produits (économie), les prix pratiqués, les résultats financiers et l’impact sur l’environnement.

Le contrôle porte également sur la régularité et la sincérité des comptabilités ainsi que sur la matérialité des opérations qui y sont décrites (réalité).

A ces divers types de vérifications, s’ajoute un contrôle administratif des comptes de matières des administrations publiques, contrôle qui aboutit à des conclusions sur les comptes individuels de matières et à une déclaration de conformité attestant la concordance de l’ensemble de ces comptes individuels de matières avec les comptes généraux des ministères.

En tout état de cause, le contrôle de la gestion est avant tout un contrôle a posteriori qui porte sur les gestions closes. La Cour ne peut en effet connaître des gestions en cours et ainsi n’effectue pas de contrôles inopinés.

2-Procédure

Le rapporteur désigné procède à l’instruction du dossier et produit un rapport provisoire qui sera suivi plus tard d’un rapport définitif suivant les observations retenues en chambre après examen des réponses des personnes visées et des conclusions du Procureur général.

3– Suites du contrôle

Les observations formulées dans le rapport provisoire, à la suite de la procédure de contradiction, sont abandonnées ou transformées en recommandations dans le rapport définitif.

Elles peuvent donner lieu à l’ouverture d’une procédure de déféré devant la chambre de discipline financière et parfois, amènent le Premier Président de la Cour à informer par voie de référé, les dirigeants des organismes contrôlé, les ministres intéressés ou les autorités de tutelle sur les irrégularités, les lacunes dans la réglementation ou des insuffisances dans l’organisation administrative et comptable constatées à l’issue du contrôle.

Une fois le rapport définitif adopté par la chambre, une lettre contenant les observations définitives de la Cour est rédigée par le président de chambre et transmise à l’ordonnateur, qui doit la communiquer à l’assemblée délibérante à sa plus proche session. Des référés du Premier Président de la Cour sont transmis aux ministres concernés pour exploitation des constatations, anomalies et recommandations issues des travaux de la Cour.

Les ministres concernés ou les autorités de tutelle sont tenus de veiller à l’application des recommandations issues du rapport.

 

La procédure en matière de discipline financière

Les poursuites devant la chambre de discipline financière (CDF) sont réglementées par la loi organique sur la Cour des comptes en ses articles 50 à 61.

La saisine

La chambre de discipline financière peut être saisie par le Président de la République, le Président de l’Assemblée nationale, le Premier ministre, le ministre chargé des Finances et le Premier président de la Cour des comptes. Les demandes de poursuites sont adressées au Procureur général.

Le déclenchement des poursuites (article 69)

 » Le Procureur général informe l’intéressé des poursuites dirigées contre lui par tout moyen » transmet le dossier par réquisitoire au président de la CDF, prononce le renvoi de l’affaire ou le classe sans suite.

 

L’instruction

Le conseiller rapporteur a tous pouvoirs d’investigation, sans entrave du secret professionnel. Saisi à l’égard d’une personne déterminée, il communique au Procureur général ses constatations concernant des personnes non visées dans l’ordre de poursuites, afin d’étendre éventuellement son instruction à ces nouvelles personnes.

Les suites de l’instruction

L’instruction peut aboutir à un classement sans suite en l’absence de charges suffisantes. Si le Procureur général estime que l’affaire peut être renvoyée devant la chambre ou s’il a été requis de poursuivre, il prononce le renvoi de l’affaire. Une copie de ses conclusions est adressée à l’autorité qui a saisi la Chambre de discipline financière  » (article 71).

Les droits de la défense

Les articles 72 et 73 aménagent les conditions d’exercice du droit de la défense au profit du mis en cause renvoyé devant la chambre de discipline financière. Il peut obtenir communication de son dossier et bénéficier de l’assistance d’un conseil.

 

Le jugement

La procédure du jugement est fixée principalement par l’article 73 de la loi organique.

A la suite du rôle d’audience arrêté par le président de la Chambre, le prévenu est cité à comparaître par le greffier de la chambre.

S’il réside à l’étranger, la citation à comparaître comportera avertissement qu’il peut demander à être jugé en son absence, par lettre adressée au président. Dans ce cas, son conseil, s’il en a un, est entendu. Le prévenu est alors, si la chambre agrée sa demande, jugé contradictoirement.

Des témoins peuvent être entendus, soit à l’initiative de la chambre, soit sur requête du Procureur général ou du prévenu. Les témoins sont entendus sous la foi du serment, dans les conditions prévues aux articles 424 à 444 du code de procédure pénale.

L’intéressé, soit par lui-même, soit par son conseil, est appelé à formuler oralement des observations complémentaires au mémoire déposé. Le Procureur général peut également présenter des conclusions orales complémentaires à ses réquisitions écrites.

Des questions peuvent être posées par le président ou avec l’autorisation de celui-ci par le Procureur général ou par les membres de la chambre au prévenu qui doit avoir la parole le dernier.

Lorsque le prévenu ne comparaît pas au jour et à l’heure fixés par la citation à comparaître, s’il n’a pas demandé à être jugé en son absence, il est fait application des dispositions des articles 474 à 482 du code de procédure pénale sur le jugement par défaut et l’opposition.

Les audiences de la chambre ne sont pas publiques sauf si le prévenu en fait la demande. La chambre siège en présence du commissaire du Droit, avec l’assistance du greffier.

La délibération a lieu hors la présence du ministère public. La formation de jugement ne peut siéger qu’en présence de trois au moins de ses membres. En cas de partage des voix, celle du président est prépondérante.

Lorsque plusieurs personnes sont impliquées dans la même affaire, leur cas peut être instruit et jugé simultanément et faire l’objet d’un seul et même arrêt.

La décision

En cas de condamnation, la peine est une amende comprise entre 100 000 F au minimum et le double du traitement ou salaire brut annuel du prévenu à la date où les faits ont été commis ou du traitement ou salaire brut annuel correspondant à l’échelon le plus élevé de la grille indiciaire de la fonction publique à l’époque des faits si l’intéressé n’est pas salarié.

La décision de la chambre de discipline financière est revêtue de la formule exécutoire. Elle n’est pas susceptible d’appel. Elle est publiée au Journal Officiel.

Elle peut, en revanche, faire l’objet de pourvoi en révision devant les chambres réunies de la Cour des comptes ou en cassation devant la Cour suprême à l’initiative du prévenu ou du Procureur général. Elle peut aussi faire l’objet d’une rectification en cas d’erreur matérielle.

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