Loi organique n°99-70 du 17 février 1999 sur la Cour des comptes (Journal officiel n° 5845 du 20/2/1999)

Loi organique n°99-70 du 17 février 1999 sur la Cour des comptes (Journal officiel n° 5845 du 20/2/1999)
EXPOSE DES MOTIFS

Le présent projet de loi s’inscrit dans le cadre de la réforme d’ensemble des institutions judiciaires initiée par le gouvernement pour mettre en place des hautes juridictions spécialisées dans les différents contentieux et branches du droit d’une part, et du respect des recommandations induites dans les directives de l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) n°05/97/CM/UEMOA du 16 décembre 1997 relative aux lois de finances et n°06/97/CM/UMEOA du 16 décembre 1997 portant règlement général sur la comptabilité publique des États membres d’autre part.

Il complète la loi organique n°92-22 du 30 mai 1992 portant révision de la Constitution et les textes subséquents sur le Conseil Constitutionnel, le Conseil d’État et la Cour de Cassation.

L’économie du présent projet de loi se présente ainsi qu’il suit :

– le chapitre premier formule des règles de base qui touchent les missions de la Cour des comptes ;

– le chapitre II décrit l’organisation de la Cour des comptes. Il présente les différents grades des magistrats, le ministère public représenté par un commissaire du Droit, les différentes formations de la Cour ainsi que le rôle de la Commission de vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques (CVCCEP), qui est intégrée à la Cour mais reste autonome dans son mode de fonctionnement. Il indique les différents pouvoirs du président de la Cour, du commissaire du Droit, du secrétaire général, des présidents de chambre et des autres collaborateurs de la Cour ;

– le chapitre III décrit les quatre principales compétences de la Cour : le jugement des comptes des comptables publics, la mission d’assistant du Parlement et du Gouvernement dans le contrôle des lois de finances, la fonction « d’auditeur » des administrations et du secteur public et son rôle de chambre de discipline financière ;

– le chapitre IV traite des règles de procédure devant la Cour. Les principes caractéristiques en sont l’auto-saisine pour lancer des contrôles ou pour juger les comptes des comptables publics, le caractère contradictoire et écrit des procédures suivies et les différentes formes de décisions de la Cour des comptes (arrêts, référés, notes) ;

– le chapitre V aborde le jugement des comptes des comptables publics en décrivant l’ensemble des règles en cette matière (dépôt des comptes, conservation des pièces justificatives, rôle des magistrats, procédures en audience, règle du double arrêt, pourvois contre les arrêts, etc…) ;

– le chapitre VI reprend l’ensemble de la loi n°98-20 portant création de la Cour de discipline financière, en la transformant en une chambre interne non permanente. Sauf pour les deux infractions visées à l’article 49 alinéa 14 et 15 du présent projet de loi, les règles et procédures sont identiques à celles de la loi de 1998 ;

– le chapitre VII énonce les principes et les règles à suivre dans les contrôles de gestion mis en œuvre par la Cour auprès des administrations, des collectivités locales et des entreprises du secteur public ;

– le chapitre VIII reprend des dispositions transitoires et finales destinées à assurer le passage de la deuxième section du Conseil d’État à la nouvelle Cour des comptes ;

Telle est l’économie de ce projet de loi organique.

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REPUBLIQUE DU SENEGAL

UN PEUPLE – UN BUT – UNE FOI

LOI ORGANIQUE N° 99-70 DU 17 FEVRIER 1999
SUR LA COUR DES COMPTES

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L’Assemblée nationale, après en avoir délibéré, a adopté en sa séance du mercredi 13 janvier 1999, à la majorité absolue des membres la composant ;
Le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution par sa décision n°1/C/1999 du 3 février 1999.
Le Président de la République promulgue la loi organique dont la teneur suit :

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CHAPITRE I
Dispositions générales

Article premier : La présente loi organique régit l’organisation, les compétences, le fonctionnement et les procédures de la Cour des comptes, juridiction financière et institution supérieure de contrôle des finances publiques.

Article 2 : La Cour des comptes juge les comptes des comptables publics et assiste le Parlement et le Gouvernement dans le contrôle de l’exécution des lois de finances.

Article 3 : La Cour des comptes contribue, par son action permanente de vérification, d’information et de conseil, à la réalisation des missions suivantes :

– la sauvegarde du patrimoine public et le contrôle de la sincérité des finances publiques,
– l’amélioration des méthodes et techniques de gestion,
– la rationalisation de l’action administrative.

Elle s’assure de la régularité des opérations de recettes et de dépenses des organismes contrôlés et, le cas échéant, réprime les manquements aux règles qui régissent lesdites opérations.
Elle vérifie et apprécie le bon emploi des crédits et la gestion de l’ensemble des organismes soumis à son contrôle.
La Cour établit un rapport général public annuel reprenant les principales observations qu’elle a faites dans l’année et les mesures préconisées pour y remédier.

Article 4 : Les contrôles dévolus à la Cour des comptes visent à :
– déceler toute irrégularité ou infraction par rapport aux normes juridiques et de gestion en vigueur de manière à permettre, dans chaque cas, de prendre les corrections nécessaires, d’engager la responsabilité des personnes en cause, d’obtenir réparation ou de décider des mesures propres à éviter pour l’avenir la répétition de tels actes,
– favoriser l’utilisation régulière et efficiente des ressources et à promouvoir l’obligation de rendre compte et la transparence dans la gestion des Finances publiques.

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CHAPITRE II
De l’organisation de la Cour des comptes

Article 5 : La Cour des comptes se compose des magistrats qui sont :

le président de la Cour ;
les présidents de chambre ;
les chefs de section ;
les conseillers maîtres ;
les conseillers référendaires ;
les conseillers.

– Le nombre de magistrats constituant la Cour est fixé par décret.

Article 6 : Les magistrats de la Cour des comptes jouissent de l’inamovibilité prévue en faveur des magistrats du siège des cours et tribunaux de la République et sont régis par un statut particulier défini par une loi organique. Ils sont nommés par décret après avis du Conseil supérieur de la Cour des comptes.

Article 7 : Le ministère public est exercé par le commissaire du Droit. Il peut être assisté d’un commissaire adjoint choisi parmi les magistrats de la Cour des comptes, sur proposition du commissaire du Droit et après avis du président de la Cour.
Le commissaire du Droit ou le commissaire adjoint sont nommés par décret. Il est mis fin à leurs fonctions dans les mêmes formes.

Article 8 : Les formations de la Cour des comptes sont :
l’audience plénière solennelle
les chambres réunies
la chambre de discipline financière
les chambres.
En cas de besoin, des sections peuvent être constituées à l’intérieur de chaque chambre.

La Cour comprend, en outre, deux formations consultatives :
– le comité des rapports et des programmes,
– la conférence des présidents et du commissaire du Droit.

Enfin, la Commission de vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques, organe de contrôle autonome, constitue une chambre au sein de la Cour. Le magistrat qui la préside a rang de président de chambre.

Article 9 : Le président de la Cour préside l’audience plénière solennelle, les chambres réunies, et les organes consultatifs. Il peut en outre présider les séances des chambres ou des commissions internes.
Il assure la direction générale de la Cour, en organise et coordonne les travaux. Il est assisté d’un secrétaire général qui est choisi parmi les magistrats de la Cour et qui est nommé par décret sur sa proposition.
Il arrête le programme annuel d’activité préalablement délibéré en comité des rapports et des programmes. Il le transmet au Président de la République.
Il signe les arrêts et décisions rendues sous sa présidence.

Il fait connaître au Président de la République, au Premier ministre et aux ministres compétents les observations formulées par la Cour, par voie de référés.
Il exerce les prérogatives qui lui sont dévolues par la présente loi par décision, ordonnance, ordonnance prise en chambres réunies, notes ou référés.
Il est chargé, après délibération des chambres réunies, de la mise en place et du suivi du règlement intérieur de la Cour.
Il remet le rapport général annuel au Président de la République et aux Présidents de l’Assemblée Nationale et du Sénat.
Il dépose le rapport sur la loi de règlement et la déclaration de conformité sur le bureau du président de l’Assemblée Nationale et les transmet au président du Sénat et au ministre chargé des Finances, pour information. Ils sont aussitôt annexés au projet de loi de règlement.
Il représente la Cour auprès des autorités sénégalaises, des pays étrangers et des organisations internationales. Il a en charge les relations avec les institutions supérieures de contrôle des finances publiques des pays étrangers et leurs groupements associatifs. Il peut contracter avec toutes les organisations internationales qui peuvent lui confier des missions dans le cadre des compétences et des capacités d’expertise de la Cour.

Article 10 : Le président de la Cour administre les services de la Cour et assure la gestion des personnels et des moyens affectés à cette institution.
Le projet de budget est préparé, chaque année, par le président de la Cour et soumis à la conférence des présidents et du commissaire du Droit.
Les crédits inscrits au budget de l’Etat figurent sous un chapitre particulier.
Le président de la Cour rend compte de l’utilisation annuelle des crédits à la conférence des présidents et du commissaire du Droit sur rapport d’un magistrat désigné chaque année par le président.

Article 11 : Avant d’entrer en fonction, le président de la Cour est installé au cours d’une audience plénière solennelle, présidée par le doyen de cette juridiction, en présence du Président de la République. Il prête le serment solennel suivant :  » Je jure de bien et loyalement remplir mes fonctions de magistrat, de les exercer en toute impartialité dans le respect de la Constitution et des lois de la République, de garder scrupuleusement le secret des délibérations et des votes, de ne prendre aucune position publique, de ne donner aucune consultation à titre privé sur les questions relevant de la compétence de la juridiction et d’observer en tout la réserve, l’honneur et la dignité que ces fonctions imposent « .
Les nouveaux magistrats prêtent le même serment, lors de leur nomination, en audience plénière solennelle.

De la même façon, le commissaire du Droit prête, lors de sa nomination, en audience plénière solennelle, le serment suivant :  » Je jure de bien et loyalement remplir mes fonctions de commissaire du Droit, de les exercer en toute impartialité dans le respect de la Constitution et des lois de la République, de garder scrupuleusement le secret des délibérations et des votes, de ne prendre aucune position publique, de ne donner aucune consultation à titre privé sur les questions relevant de la compétence de la juridiction et d’observer en tout la réserve, l’honneur et la dignité que ces fonctions imposent « .

Article 12 : En cas d’empêchement ou d’absence, le président est suppléé par le plus ancien des présidents de chambre dans l’ordre de nomination à la Cour.

Article 13 : Le commissaire du Droit bénéficie en tant que de besoin des services administratifs de la Cour.
Il est présent ou représenté dans les formations consultatives de la Cour quand il n’en est pas membre.
Il veille à la bonne application des lois et règlements au sein de l’institution supérieure de contrôle.
Il adresse des conclusions écrites et des réquisitions écrites ou fait des observations orales complémentaires aux différentes formations juridictionnelles. Lui sont obligatoirement communiqués tous les rapports ou arrêts, gestions de fait, saisines de faute de gestion et pourvois en révision ou cassation, pour avis.
Il peut communiquer directement avec les autorités administratives ou judiciaires par notes du Parquet.
Il tient l’état des ordonnateurs et des comptables publics ainsi que des services de l’Etat, des collectivités locales et des entreprises ou organismes assujettis au contrôle de la Cour.
Il est informé par le secrétaire général des retards dans la production des comptes et des pièces justificatives.
Il est consulté par le président de la cour avant toute décision de destruction des liasses.
Il défère à la Cour les opérations présumées constitutives de gestion de fait ou les actes susceptibles de relever de la chambre de discipline financière.
Il requiert l’application des amendes prévues par la loi organique sur la Cour des comptes.
Il suit, en relation avec les services habilités du ministère chargé des finances, l’exécution des arrêts et décisions de la Cour.

Article 14 : Le secrétaire général, assisté du greffier en chef, veille à la production des comptes dans les délais réglementaires et avise le commissaire du Droit en cas de retard.
Il assiste le président de la Cour dans la coordination des travaux de l’institution et dans l’organisation des audiences des formations de la Cour.
Il dirige, sous l’autorité du président, les services administratifs de la Cour et du greffe.
Il notifie tous les jugements de la Cour et certifie les copies et extraits des actes juridictionnels de celle-ci.

Article 15 : La Cour des comptes siège en  » audience plénière solennelle « , notamment pour procéder à l’installation des magistrats dans leurs fonctions, pour approuver le rapport général annuel, le rapport sur la loi de règlement et la déclaration de conformité, pour l’ouverture de son activité annuelle ou pour d’autres motifs, sur un ordre du jour particulier arrêté par le président. Y assistent l’ensemble des magistrats ainsi que le commissaire du Droit et le commissaire adjoint.

Article 16 : La Cour siège  » en chambres réunies  » pour :
– formuler des avis sur les questions importantes de procédure ou de jurisprudence,
– juger des affaires qui lui sont déférées par le président de la Cour, sur renvoi d’une chambre, sur réquisition du commissaire du Droit, sur renvoi après cassation ou sur recours en révision d’un arrêt de la chambre de discipline financière,
– arrêter, avant approbation en audience plénière solennelle,
– le texte du rapport sur le projet de la loi de règlement ;
– le texte de la déclaration générale de conformité ;
– le texte du rapport général annuel.
– statuer sur l’amende prévue à l’article 30 de la présente loi.

Les chambres réunies sont, en outre, saisies par le président de la Cour, de tout problème d’organisation et de fonctionnement de l’institution.

Les chambres réunies se composent du président de la Cour, des présidents de chambre, du président de la Commission de vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques (C.V.C.C.E.P.), des chefs de section et de deux magistrats de chaque grade élus par leurs collègues pour deux ans.

Elles sont complétées, pour chaque affaire, par un magistrat rapporteur qui a voix consultative.
Le commissaire du Droit et le secrétaire général assistent aux séances ainsi que le greffier en chef.

Article 17 : La Cour des comptes est organisée en chambres dont le nombre est fixé par décret, sur proposition du président de la Cour.
Chaque chambre est formée d’un président de chambre, de chefs de section s’il y a lieu, de conseillers maîtres, de conseillers référendaires et de conseillers.

Article 18 : Les présidents de chambre sont chargés de présider une des chambres de la Cour. Leur affectation ainsi que celles des magistrats, la division des chambres en sections et les compétences respectives de chaque chambre sont décidées par ordonnance du président, prise en chambres réunies.

Article 19 : Les chambres ou les sections de chambre siègent en audience, avec, au minimum, trois magistrats de la chambre y compris le président de chambre ou le chef de section.
– Le conseiller rapporteur assiste à l’audience avec voix délibérative. Le greffier de la chambre est présent et rédige le procès verbal de la séance.
En l’absence de quorum, il peut être fait appel à un magistrat d’une autre chambre.

Article 20 : Les présidents de chambre dirigent les activités de leurs chambres. A ce titre, ils :
– président les audiences et réunions de leur chambre ;
– dirigent les personnels affectés dans leur chambre ;
– soumettent au président de la Cour, leurs propositions en vue de l’établissement du programme annuel d’activité et assurent la mise en œuvre et le suivi du programme approuvé ;
– répartissent les dossiers entre les membres de leurs chambres et veillent à leur traitement dans les meilleurs délais ;
– informent régulièrement le président de la Cour sur l’état d’exécution des travaux en cours et lui proposent toutes mesures propres à accroître les performances de la juridiction ;
– s’assurent de la qualité des travaux effectués, en veillant à la formation permanente des membres placés sous leur autorité et à l’application des méthodologies ou normes de vérification adoptées par la Cour ;
– transmettent au président de la Cour les projets de référés et d’insertions au rapport général annuel émanant de la chambre.

Article 21 : Le comité des rapports et des programmes est chargé de la préparation et de la présentation des rapports prévus à l’article 16.
Il est composé du président de la Cour, du commissaire du Droit, des présidents de chambre, du président de la CVCCEP, du rapporteur général désigné pour chaque rapport et du secrétaire général de la Cour. Le président peut y désigner d’autres magistrats de la Cour, en fonction des insertions proposées par les chambres.

Article 22 : La conférence des présidents et du commissaire du Droit est composée du président de la Cour, du commissaire du Droit, des présidents de chambre, du président de la CVCCEP et du greffier en chef. Le secrétaire général tient le secrétariat et a voix consultative. Elle est consultée, à l’initiative du président de la Cour, sur l’organisation, les travaux et l’activité générale de l’institution.

Article 23 : La Cour peut disposer de rapporteurs particuliers dont elle assure la formation dans les conditions et selon les modalités définies par ordonnance du président, prise en chambres réunies.

Ces rapporteurs sont soit contractuels soit fonctionnaires ou agents non fonctionnaires et choisis en fonction de leurs compétences particulières dans les contrôles programmés par la Cour. Ils ont pour mission de participer aux travaux de vérification des comptes et aux contrôles sur place et sur pièces, sous la direction et la responsabilité des magistrats instructeurs.

Ces rapporteurs particuliers, placés durant leur mission sous l’autorité hiérarchique du président de la Cour, sont affectés auprès des présidents de chambre. Ces personnels ne sont pas membres de la Cour et ne peuvent y exercer aucune activité juridictionnelle. Ils sont assujettis à l’obligation du secret professionnel et bénéficient de la même protection que les magistrats dans l’exercice de leur mission. Leurs conditions de service et de rémunération sont fixées par décret.
La Cour des comptes peut, en outre, recourir, pour des enquêtes de caractère technique, à l’assistance d’experts désignés par le président de la Cour. Ces experts sont assujettis à l’obligation du secret professionnel dans la mission qui leur est confiée. Ils sont rémunérés sur vacations dont les taux sont fixés par décret.

Article 24 : La Cour peut également disposer, par voie de détachement ou de mise à disposition, des fonctionnaires ou agents non fonctionnaires qualifiés en matière juridique, fiscale, douanière, économique, comptable et financière pour exercer les fonctions d’assistant. Ils ne sont pas membres de la Cour et ne peuvent y exercer aucune fonction juridictionnelle. Ils ont pour mission de seconder les magistrats ou les rapporteurs particuliers dans les missions dont ils ont la responsabilité. Ils sont assujettis à l’obligation de secret professionnel. Leurs conditions de service et de rémunération, la durée renouvelable des fonctions varient selon les capacités et l’expérience de chaque assistant et sont fixées dans leur arrêté de nomination.

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CHAPITRE III
De la compétence de la Cour

Article 25 : Sous réserve des dispositions de l’article 34 ci-après, la Cour juge les comptes des comptables principaux. A l’égard de la Cour des comptes, est comptable public tout fonctionnaire ou agent ayant qualité pour exécuter au nom d’un organisme public des opérations de recettes, de dépenses ou de maniement de titres, soit au moyen des fonds et valeurs dont il a la garde, soit par virements internes d’écritures, soit par l’entremise d’autres comptables publics ou de comptes externes de disponibilités dont il ordonne ou surveille les mouvements.

La Cour juge également les comptes que lui rendent les personnes qu’elle a déclarées comptables de fait. Est réputé comptable de fait toute personne qui effectue, sans y être habilitée par une autorité compétente, des opérations de recettes, de dépenses, de détention ou de maniements de fonds ou valeurs appartenant à un organisme public. Il en est de même de toute personne qui reçoit ou manie directement ou indirectement, des fonds ou valeurs extraits irrégulièrement de la caisse d’un organisme public et de toute personne qui, sans avoir la qualité de comptable public, procède à des opérations sur les fonds ou valeurs n’appartenant pas aux organismes publics mais que les comptables publics sont exclusivement chargés d’exécuter en vertu des lois et règlements en vigueur.

Les gestions de fait entraînent les mêmes obligations et responsabilités que les gestions patentes et sont jugées comme elles.

Toute personne déclarée gestionnaire de fait, sauf si elle est poursuivie pour les mêmes faits au pénal, peut être condamnée à une amende, pour immixtion dans les fonctions de comptable public. Le montant de cette amende est fixé suivant l’importance et la durée du maniement ou de la détention des deniers. Son maximum ne pourra dépasser le total des sommes indûment détenues ou maniées.

Article 26 : La Cour des comptes assiste le Parlement et le Gouvernement dans le contrôle de l’exécution des lois de finances.
Elle contrôle la régularité et la sincérité des recettes et des dépenses décrites dans les comptabilités publiques. Elle s’assure du bon emploi des crédits, fonds et valeurs gérés par les services de l’Etat et par les autres organismes publics. Constituent des organismes publics au sens de la présente loi, l’Etat, les collectivités locales et leurs établissements publics.
Elle effectue toute enquête complémentaire qui pourrait lui être demandée par le Parlement à l’occasion de l’examen ou du vote du projet de loi de règlement.

Article 27 : La Cour des comptes, par l’intermédiaire de la Commission de vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques, vérifie les comptes et contrôle la gestion des entreprises du secteur public selon les catégories ci-après désignées :
– les établissements publics à caractère industriel et commercial,
– les établissements publics à caractère scientifique et technologique ;
– les établissements publics professionnels ;
– les établissements publics de santé ;
– les autres établissements publics dont la création sera décidée ultérieurement ;
– les sociétés nationales,
– les sociétés anonymes à participation publique majoritaire.

De la même façon, elle peut vérifier les comptes et la gestion de tout organisme dans lequel l’Etat ou les organismes soumis au contrôle de la Cour, détiennent, directement ou indirectement, séparément ou ensemble, une participation au capital social permettant d’exercer un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion.
La Cour contrôle les institutions de sécurité sociale, y compris les organismes de droit privé qui assurent en tout ou en partie la gestion d’un régime de prévoyance ou de retraite légalement obligatoire.
Elle s’assure en outre que les administrations centrales, les services déconcentrés de l’Etat, les sociétés nationales, les établissements publics et les collectivités locales sont en règle avec les contributions et cotisations dont ils sont redevables envers ces organismes.

La Cour peut également exercer un contrôle du compte d’emploi des ressources collectées auprès du public, dans le cadre de campagnes menées à l’échelon national par tout organisme public ou privé faisant appel à la générosité publique. Ce contrôle a pour but de vérifier la conformité des dépenses engagées par ces organismes aux objectifs poursuivis et annoncés par l’appel à cette générosité publique. S’il y a lieu, il peut comporter des vérifications auprès des organismes qui ont été bénéficiaires des ressources collectées dans le cadre de ces campagnes.
Enfin, par la Commission de vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques, la Cour a la faculté d’exercer un contrôle de la gestion de tout organisme bénéficiant, sous quelque forme que ce soit, du concours financier ou de l’aide économique de l’Etat ou des organismes publics qui relèvent de la Cour, conformément aux dispositions des articles 47 à 51 de la loi 90.07 du 26 juin 1990 ainsi que du concours financier de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine.

Article 28 : La Cour a, en chambre de discipline financière, compétence pour sanctionner les fautes de gestion et prononcer des amendes, dans les cas prévus par la présente loi.

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CHAPITRE IV
De la procédure devant la Cour des comptes

Article 29 : La Cour des comptes exerce de plein droit les compétences prévues dans la présente loi, soit dans le cadre du programme annuel qu’elle définit soit sur demande particulière du Gouvernement ou du Parlement.

Article 30 : La Cour est habilitée à se faire communiquer tous documents de quelque nature que ce soit, relatifs à la gestion des services ou organismes soumis à son contrôle. Pour les besoins de leurs enquêtes, les magistrats et rapporteurs exercent directement le droit de communication que les agents de services financiers de l’Etat tiennent de la loi.
Les agents des services financiers ainsi que les commissaires aux comptes des organismes contrôlés sont déliés du secret professionnel à l’égard des magistrats et rapporteurs de la Cour, à l’occasion des enquêtes que ceux-ci effectuent dans le cadre de leurs missions.
Les magistrats et les rapporteurs ont, dans l’exercice de leurs fonctions et dans la limite de leurs attributions, un droit d’accès permanent dans tous les bureaux, locaux ou dépendances des organismes soumis au contrôle de la Cour.

Tout refus injustifié soit de communiquer les renseignements ou documents demandés, soit de laisser visiter les locaux, soit de répondre à une convocation est passible d’une amende de 100.000 F minimum et de 1.000.000 F maximum, délibérée en chambres réunies. Lorsque le refus est persistant, les montants de l’amende sont portés au double. En cas d’entrave caractérisée, outre les sanctions disciplinaires ou administratives qui peuvent être demandées par la Cour, le président de la Cour peut désigner un commis d’office, à la place du responsable de l’entrave et à ses frais.
Toute destruction de preuve ou de pièces justificatives est considérée comme une entrave caractérisée et peut en outre faire l’objet de poursuites pénales.
La Cour prend toutes dispositions pour assurer le secret de ses investigations.

Article 31 : Sauf exceptions prévues dans la présente loi, la procédure suivie devant la Cour des comptes est écrite et contradictoire.

Dans les procédures juridictionnelles, lorsqu’il y a prononcé d’une amende, les parties peuvent se faire assister par un avocat de leur choix sans que cette assistance puisse valoir représentation en matière de jugement des comptes.

Article 32 : Les délibérations de la Cour sont exprimées en la forme d’arrêts ou de communications aux intéressés, aux pouvoirs publics ou aux autorités administratives compétentes.
Elles sont prises à la majorité des voix, le président de séance ayant voix prépondérante en cas de partage de celles-ci.
A l’exception de l’audience plénière solennelle, les séances des diverses formations se déroulent à huis clos.

Article 33 : La Cour juge en premier et dernier ressort et ses arrêts sont, à peine de nullité, motivés. Les voies de recours admises contre les arrêts définitifs sont la révision devant la Cour des comptes et la cassation devant le Conseil d’Etat.
L’introduction d’une procédure de révision ou de cassation ne fait pas obstacle à l’exécution de l’arrêt attaqué, sauf sursis à exécution ordonné par le président de la Cour, après avis du commissaire du Droit.
Les arrêts définitifs de la Cour des comptes sont revêtus de la formule exécutoire lorsqu’ils donnent lieu à la fixation d’une amende ou la prononciation d’un débet.

Dans ce cas, leur exécution est poursuivie par toutes les voies de droit, à la diligence du ministre chargé des finances. Un rapport sur l’état des procédures de recouvrement, en cours ou achevées dans l’année, est adressé chaque année par le ministre chargé des finances au Président de la République, au Premier ministre et au président de la Cour des comptes.

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CHAPITRE V
Du jugement des comptes

Article 34 : Tout comptable public doit rendre compte de sa gestion devant la Cour

Cependant, sous réserve du droit d’évocation de la Cour des comptes exercé par voie d’arrêt, le trésorier général apure les comptes présentés par les comptables des organismes publics d’Etat désignés par la réglementation en vigueur.
– Si le comptable est déchargé ou quitte, sa décision produit les mêmes effets qu’une décision de la Cour.
– En cas de débet, le trésorier général en fixe le montant à titre conservatoire et transmet le dossier et les pièces justificatives à la Cour des comptes qui, après demande de justification au comptable, statue à titre définitif.
De la même façon, les trésoriers payeurs régionaux procèdent à l’apurement administratif des comptes des comptables des collectivités locales prévu à l’article 342 du code des collectivités locales.

Cinq mois après la clôture de chaque gestion, les comptables publics sont tenus de présenter leur compte de gestion accompagné de toutes les pièces justificatives, par l’intermédiaire de leur supérieur hiérarchique qui s’assure que les comptes sont en état.
Tout comptable public qui ne présente pas ses comptes dans le délai prescrit peut être condamné par la chambre compétente à une amende dont le montant est fixé par décret. Cette amende est recouvrée conformément aux dispositions de l’article 37.

Article 35 : La Cour des comptes est tenue de conserver les pièces justificatives de recettes et dépenses reçues pendant un délai minimum de quatre années à partir de la fin de l’année financière à laquelle se rattachent lesdites pièces.
La Cour peut, d’un commun accord avec le ministère chargé des finances, déterminer périodiquement les pièces justificatives qui ne seront pas envoyées à la Cour mais conservées par les comptables pendant le même délai.
Ce délai est porté à cinq ans en ce qui concerne les pièces générales, notamment le budget, les états de l’actif et du passif, les restes à recouvrer et les restes à payer.
Les pièces jointes à l’appui des observations figurant aux rapports à fin d’arrêt sont conservées pendant un an à partir de la notification de l’arrêt définitif s’y rapportant.
A l’expiration de ce délai, il ne peut être procédé à la destruction d’aucune pièce sans qu’elle n’ait été décidée par le président de la Cour.
Toutefois après l’arrêt provisoire, le président de la Cour peut, sur proposition du président de chambre et après consultation du commissaire du Droit, décider de la destruction immédiate des pièces justificatives qui n’ont pas fait l’objet d’observations.
Le président de la Cour décide également, dans les mêmes conditions, de la destruction des autres pièces, sous réserve de l’application des dispositions des alinéas précédents.

Article 36 : Le président de chambre répartit les dossiers des comptes entre les magistrats. D’autres rapporteurs peuvent également être désignés, en concertation avec les présidents de la Commission de vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques et des autres chambres de la Cour, parmi les magistrats de ces organes.
Les rapporteurs procèdent à la vérification des comptes en se rapportant aux pièces de recettes et de dépenses et aux justifications qui y sont annexées. Ils présentent leur rapport à la chambre qui rend un arrêt provisoire.
Cet arrêt provisoire est notifié au comptable à qui la Cour adresse ses observations et injonctions éventuelles.
Le président de la Cour des comptes peut également confier à la Commission de vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques, le soin de s’assurer sur pièces et sur place du bon emploi des crédits, fonds et valeurs gérés par les services de l’Etat, les collectivités locales et les établissements publics. Dès la fin de la procédure, la Commission de vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques transmet ses conclusions définitives au président de la Cour ainsi qu’à la chambre concernée qui statue définitivement sur celles-ci.

Article 37 : Le comptable public dispose d’un délai maximum d’un mois pour produire ses justifications aux observations et injonctions de la chambre.
Le retard du comptable dans la production des justifications peut être sanctionné dans l’arrêt définitif par une amende de 100.000 francs au maximum par injonction et par mois de retard s’il ne fournit à la chambre aucune justification valable de ce retard.
Le recouvrement de cette amende est assuré par le receveur général du Trésor qui est destinataire des extraits d’arrêts. Il est poursuivi par tous moyens de droit, notamment par précompte sur le traitement, le salaire ou les indemnités perçues par le comptable.

Article 38 : Dès que l’affaire est complètement instruite, la chambre rend un arrêt définitif.
Si le compte est reconnu régulier, la chambre rend un arrêt de décharge à l’égard du comptable demeuré en fonction ; à l’égard du comptable sorti de fonctions, elle rend un arrêt de quitus qui donne main levée de toutes les sûretés et garanties grevant les biens personnels du comptable au profit du Trésor public.
Si le compte est irrégulier par défaut, c’est à dire si les écritures du comptable ne font pas état de tous les deniers qu’il a reçus ou aurait dû recevoir, ou s’il a payé à tort certaines dépenses, l’arrêt le déclare en  » débet « .
Au vu de l’arrêt de débet, le ministre chargé des Finances met en jeu la responsabilité du comptable et, le cas échéant, les garanties correspondantes.

Article 39 : La Cour juge les comptes en premier et dernier ressort. Toutefois, le comptable ou ses héritiers peuvent demander à la Cour la révision d’un arrêt définitif en produisant des pièces justificatives retrouvées depuis ledit arrêt.
La Cour peut également procéder à la révision d’un arrêt définitif pour cause d’erreur, omission, faux ou double emploi reconnus par la vérification d’autres comptes soit d’office, soit à la demande du ministre chargé des finances ainsi que des représentants des collectivités locales et établissements publics concernés.

Article 40 : Tout arrêt définitif rendu par une chambre peut également, sur le pourvoi du comptable, du ministre chargé des finances, des ministres concernés, ou du représentant légal de l’organisme dont dépend le comptable, être soumis à Cassation pour cause d’incompétence, de vice de forme ou de violation de la loi. Ce pourvoi est formé devant le Conseil d’Etat dans le mois de la notification de l’arrêt.

Si la Cassation est prononcée, l’affaire est renvoyée pour jugement devant la formation  » en chambres réunies  » de la Cour des comptes, conformément à l’article 16 de la présente loi. La formation de renvoi est tenue de se conformer à l’arrêt de cassation qui a, à son égard, l’autorité de la chose jugée.

Article 41 : Les arrêts de la Cour des comptes n’apportent pas de changement au résultat général du compte en jugement. Toutefois, en cas d’inexactitude dans le report du reliquat fixé par un arrêt précédent, le comptable est tenu de passer les écritures de régularisation au compte de la gestion en cours.

Article 42 : Lorsque, à l’examen du compte, il apparaît que le comptable peut encourir une sanction pénale, le président de la Cour en saisit le Garde des sceaux, ministre de la Justice et en informe le ministre chargé des finances.

Article 43 : Sous réserve des dispositions de l’article 342 du Code des collectivités locales, le président de la Cour, sur proposition du président de chambre, peut, en cas d’encombrement de cette chambre, décider par ordonnance que certains comptes concernant les collectivités locales et leurs établissements publics subordonnés, seront apurés par un comptable supérieur du Trésor.

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CHAPITRE VI
Des attributions de la Cour en matière de discipline financière

Article 44 : La Cour exerce une fonction juridictionnelle en matière de discipline financière. Cette attribution s’exerce par la chambre de discipline financière devant laquelle sont déférés les auteurs des faits visés à l’article 49 de la présente loi.

Article 45 : La formation en  » chambre de discipline financière  » comprend un président, deux conseillers maîtres et deux conseillers référendaires.
La fonction de président de la chambre de discipline financière est occupée par un des présidents de chambre désigné par le président de la Cour, pour une durée minimum de deux ans. Il peut être suppléé par l’un des autres présidents de chambre, dans l’ordre de nomination à la Cour.
Les deux conseillers maîtres et les deux conseillers référendaires sont désignés par le président de la Cour pour deux ans renouvelables.
Un conseiller rapporteur est désigné pour instruire chaque affaire par le président de la chambre parmi les autres membres de la Cour. Il a voix délibérative pour les dossiers dont il a la charge.

Article 46 : Les fonctions du ministère public sont assurées par le commissaire du Droit.

Article 47 : La chambre de discipline financière dispose d’un greffier, désigné par le président de la Cour parmi les greffiers de la Cour des comptes.

Article 48 : Est déféré devant la chambre de discipline financière, tout fonctionnaire civil, tout militaire, tout magistrat, tout agent de l’Etat, tout membre du cabinet du Président de la République, du Président de l’Assemblée Nationale, du Président du Sénat, du Premier Ministre ou d’un ministre, tout agent d’une collectivité publique ou d’un établissement public, d’une société nationale, d’une société anonyme à participation publique et généralement, de tout organisme bénéficiant du concours financier de la puissance publique, toute personne investie d’un mandat public et toute personne ayant exercé de fait lesdites fonctions, à qui il est reproché un ou plusieurs faits énumérés à l’article 49 de la présente loi.

Article 49 : Est punissable :

A/ – EN MATIERE DE DEPENSES :

1) – le fait de n’avoir pas soumis à l’examen préalable des autorités habilitées à cet effet, dans les conditions prévues par les textes en vigueur, un acte ayant pour effet d’engager une dépense;

2) – le fait d’avoir imputé ou fait imputer irrégulièrement une dépense ou d’avoir enfreint la réglementation en vigueur concernant la comptabilité de matières ;

3) – le fait d’avoir passé outre au refus de visa d’une proposition d’engagement de dépenses, excepté dans le cas où l’avis conforme du ministre chargé des finances a été obtenu préalablement par écrit ;
4) – le fait d’avoir engagé des dépenses sans avoir reçu à cet effet délégation de signature ;

5) – le fait d’avoir produit, à l’appui ou à l’occasion de ses liquidations, de fausses certifications.

6) – le fait d’avoir enfreint la réglementation en vigueur concernant les marchés ou conventions d’un des organismes visés à l’article 48 ci-dessus ;
Sont notamment considérées comme infraction à la réglementation des marchés ou conventions :

a) le fait d’avoir procuré ou tenté de procurer à un cocontractant de l’administration ou d’un des organismes visés ci-dessus, un bénéfice anormal, à dire d’expert ;

b) le fait de n’avoir pas assuré une publicité suffisante aux opérations dans les conditions prévues par les textes en vigueur ;

c) le fait de n’avoir pas fait appel à la concurrence dans les conditions prévues par les textes en vigueur.

7) – le fait de s’être livré, dans l’exercice de ses fonctions, à des faits caractérisés créant un état de gaspillage ;
Sont notamment considérés comme réalisant un état de gaspillage :

a) les transactions trop onéreuses pour la collectivité intéressée, en matière de commande directe, de marché ou d’acquisition immobilière ;

b) les stipulations de qualité ou de fabrication qui, sans être requises par les conditions d’utilisation des travaux ou de fournitures, seraient de nature à accroître le montant de la dépense ;

c) les dépenses en épuisement de crédits.

8) – le fait d’avoir enfreint les règles régissant l’exécution des dépenses ;

9) – le fait d’avoir négligé, en sa qualité de chef de service responsable de leur bonne exécution, de contrôler les actes de dépenses de ses subordonnés ;

10) – le fait d’avoir omis sciemment de souscrire les déclarations qu’ils sont tenus de fournir aux administrations fiscales et sociales conformément aux codes en vigueur ou d’avoir fourni sciemment des déclarations inexactes ou incomplètes.

B/ EN MATIERE DE RECETTES :

11) – le fait d’avoir manqué de diligences pour faire prévaloir les intérêts de l’Etat ou de toute autre personne morale visée à l’article 48 de la présente loi, notamment le défaut de poursuite d’un débiteur ou de constitution de sûreté réelle ;

12) – le fait d’avoir enfreint les règles régissant l’exécution des recettes ;

13) – le fait d’avoir négligé en sa qualité de chef de service responsable de leur bonne exécution, de contrôler les actes de recettes effectués par ses subordonnés.

C/ DE MANIERE GENERALE :

14) – le fait d’avoir dans l’exercice de ses fonctions ou attributions, en méconnaissance de ses obligations, procuré ou tenté de procurer à autrui ou à soi-même, directement ou indirectement, un avantage injustifié, pécuniaire ou en nature, entraînant un préjudice pour le Trésor, la collectivité ou l’organisme intéressé.

15) – le fait d’avoir entraîné la condamnation d’une personne morale de droit public ou d’une personne de droit privé chargée de la gestion d’un service public, en raison de l’inexécution totale ou partielle ou de l’exécution tardive d’une décision de justice.

Article 50 : Les auteurs des faits mentionnés à l’article 49 de la présente loi ne sont passibles d’aucune sanction s’ils peuvent exciper d’un ordre écrit préalablement donné, à la suite d’un rapport particulier à chaque affaire, par leur supérieur hiérarchique dont la responsabilité se substituera dans ce cas à la leur ou par le ministre compétent, le Premier Ministre ou le Président de la République.

Article 51 : La chambre applique à titre de sanction une amende dont le minimum ne peut être inférieur à 50.000 francs CFA et dont le maximum pourra atteindre le double du traitement ou salaire brut annuel alloué à l’auteur des faits à la date à laquelle ceux-ci ont été commis.

Article 52 : Lorsque les personnes mentionnées à l’article 48 ne perçoivent pas une rémunération ayant le caractère d’un traitement ou salaire, le maximum de l’amende pourra atteindre le double du montant du traitement ou salaire brut annuel correspondant à l’échelon le plus élevé de la grille indiciaire de la fonction publique à l’époque des faits.

Article 53: Les sanctions prononcées par la chambre de discipline financière ne pourront se cumuler que dans la limite des maxima prévus aux articles 51 et 52.

Article 54 : La chambre ne peut être saisie quatre années révolues après le jour de la découverte des faits de nature à donner lieu à l’application des sanctions prévues en matière de discipline financière.

Article 55 : Ont qualité pour saisir la chambre de discipline financière :

– le Président de la République ;
– le Président de l’Assemblée nationale ;
– le Président du Sénat ;
– le Premier Ministre ;
– le ministre chargé des Finances ;
– le président de la Cour des comptes ;
– le président de la Commission de vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques.

Les demandes de poursuites sont adressées au commissaire du Droit.

Article 56 : Le commissaire du Droit saisi informe l’intéressé des poursuites dirigées contre lui par lettre recommandée avec avis de réception, puis transmet le dossier au président de la chambre qui désigne un rapporteur pour procéder à l’instruction de l’affaire.

Article 57 : Le conseiller rapporteur a qualité pour procéder à toutes enquêtes et investigations utiles auprès de toute administration, se faire communiquer tout document, même secret, et entendre tout témoin.
Il peut, en cours d’instruction, saisir le commissaire du Droit de ses constatations concernant des personnes non visées dans l’ordre de poursuites.
Il peut demander un complément d’information à l’inspection générale d’Etat ou à l’organe habilité à cet effet, sous le couvert de l’autorité qui a saisi la chambre.

Article 58 : Lorsque l’instruction est terminée, le conseiller rapporteur transmet le dossier au président de la chambre qui le communique au commissaire du Droit.
Si celui-ci estime que l’affaire doit être classée sans suite, l’instruction n’ayant pas apporté de charges suffisantes, il communique le dossier, avec ses conclusions, à l’autorité qui l’a saisi.
Cette autorité doit, dans un délai d’un mois, le requérir de poursuivre, de classer ou de demander un supplément d’information. En l’absence de réponse dans ce délai, l’autorité saisie est présumée avoir acquiescé aux conclusions du commissaire du Droit qui classe sans suite.

Si le commissaire du Droit estime que l’affaire peut être renvoyée devant la chambre ou s’il a été requis de poursuivre, il prononce le renvoi de l’affaire. Une copie de ses conclusions est adressée à l’autorité qui a saisi la chambre de discipline financière.

Article 59 : En cas de renvoi par le commissaire du Droit, le greffier avise le prévenu par voie d’huissier, qu’il peut, dans le délai de huit jours, prendre connaissance au greffe de la chambre du dossier de l’affaire qui contient les conclusions du commissaire du Droit. La consultation du dossier fait l’objet d’un procès verbal du greffier qui est joint au dossier.
S’il réside à l’étranger, le prévenu peut, dans le délai de quinze jours à compter de la consultation du dossier, produire un mémoire écrit qui est porté à la connaissance du commissaire du Droit. S’il n’a pas pu prendre connaissance du dossier, le délai de production du mémoire est porté à un mois à dater de la réception de la notification par l’ambassade du Sénégal juridiquement compétente pour son pays de résidence.
L’intéressé peut demander l’assistance d’un conseil.

Article 60 : Le président de la chambre prend une ordonnance pour l’ouverture de la session de jugement dans laquelle il arrête le rôle des audiences. Le prévenu est alors cité à comparaître par le greffier de la chambre. Si le prévenu réside à l’étranger, la citation à comparaître comportera avertissement qu’il peut demander à être jugé en son absence, par lettre adressée au président qui sera jointe au dossier.
Dans ce cas, son défenseur, s’il en a un, est entendu.
Le prévenu est alors, si la chambre agrée sa demande, jugé contradictoirement.
Des témoins peuvent être entendus, soit à l’initiative de la chambre, soit sur requête du commissaire du Droit ou du prévenu.
Les témoins sont entendus sous la foi du serment, dans les conditions prévues aux articles 424 à 444 du code de procédure pénale.
L’intéressé, soit par lui-même, soit par son conseil, est appelé à formuler oralement des observations complémentaires au mémoire déposé. Le commissaire du Droit peut également présenter des conclusions orales complémentaires à ses réquisitions.
Des questions peuvent être posées par le président ou avec l’autorisation de celui-ci par le commissaire du Droit ou par les membres de la chambre au prévenu qui doit avoir la parole le dernier.

Lorsque le prévenu ne comparait pas au jour et à l’heure fixés par la citation à comparaître, s’il n’a pas demandé à être jugé en son absence, il est fait application des dispositions des articles 474 à 482 du code de procédure pénale sur le jugement par défaut et l’opposition.
Les audiences de la chambre ne sont pas publiques.
La chambre siège en présence du commissaire du Droit, avec l’assistance du greffier. La délibération a lieu hors la présence du ministère public. En cas de partage des voix, celle du président est prépondérante.

Article 61 : Lorsque plusieurs personnes sont impliquées dans la même affaire, leur cas peut être instruit et jugé simultanément et faire l’objet d’un seul et même arrêt.

Article 62 : Les arrêts de la chambre ne sont pas susceptibles d’appel. Ils sont revêtus de la formule exécutoire et notifiés par le secrétaire général de la Cour des comptes aux intéressés, à l’autorité qui a saisi la chambre, au ministre chargé des Finances et le cas échéant aux ministres dont dépendent les personnes condamnées.
Ils sont publiés au journal officiel.

Article 63 : Les arrêts de la chambre peuvent faire l’objet d’un recours en cassation porté devant le Conseil d’Etat statuant dans les conditions prévues par la loi organique sur le Conseil d’Etat.
En cas de cassation, l’affaire est renvoyée devant la formation  » en chambres réunies  » de la Cour des comptes.

Article 64 : Les arrêts de la chambre de discipline financière peuvent également faire l’objet d’un recours en révision devant les chambres réunies de la Cour des comptes s’il survient un fait nouveau de nature à mettre le prévenu hors de cause. Ce recours peut être demandé par les personnes condamnées ou leurs héritiers en cas de décès, ou par la Cour des comptes si elle a connaissance des faits nouveaux susceptibles de justifier la révision des arrêts prononcés.

Article 65 : Les amendes prononcées par application des articles 51 et 52 de la présente loi présentent le même caractère que les amendes prononcées par la Cour des comptes. Elles ne peuvent faire l’objet d’aucune remise ou décharge, sauf grâce présidentielle.
Le recouvrement en est assuré par le comptable chargé du recouvrement selon les modalités de l’article 37 de la présente loi.

Article 66 : Les poursuites devant la chambre de discipline financière ne font pas obstacle à l’exercice de l’action pénale ou disciplinaire de droit commun. Si l’instruction ou la délibération sur l’affaire laisse apparaître des faits susceptibles de constituer un délit ou un crime, le président de la Cour transmet le dossier au Garde des Sceaux, ministre de la Justice et en informe le ministre chargé des finances. De la même façon, si une sanction disciplinaire peut être encourue, le président de la Cour communique le dossier à l’autorité compétente.

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CHAPITRE VII
Du contrôle non juridictionnel

Article 67 : Le contrôle exercé par la Cour des comptes en vertu des articles 26 et 27 de la présente loi vise à apprécier la qualité de la gestion et à formuler, éventuellement, des suggestions sur les moyens susceptibles d’en améliorer les méthodes et d’en accroître l’efficacité et le rendement.

Ce contrôle englobe tous les aspects de la gestion. La Cour apprécie la réalisation des objectifs assignés, l’adéquation des moyens utilisés, les coûts des biens et services produits, les prix pratiqués et les résultats financiers. Le contrôle porte également sur la régularité et la sincérité des comptabilités ainsi que sur la matérialité des opérations qui y sont décrites.
En aucun cas, ce contrôle ne peut permettre d’ingérence dans la gestion des entités contrôlées.

Article 68 : A des périodes déterminées par les textes en vigueur, les ordonnateurs des dépenses publiques transmettent à la Cour des comptes la situation des dépenses engagées. Ces situations comportent, par imputation budgétaire, le montant des crédits ouverts, celui des ordonnancements, les crédits restant disponibles et, le cas échéant, les dépassements avec justification de l’acte qui les a autorisés.
Les pièces ayant permis la préparation et l’exécution de l’engagement, de la liquidation, du mandatement et, éventuellement, du paiement de la dépense sont conservées par les ordonnateurs pendant les délais prescrits par les textes et tenues à la disposition de la Cour des comptes qui peut en obtenir communication ou copie chaque fois qu’elle le juge nécessaire. Il en est de même des pièces concernant les recettes.

Article 69 : Les organismes visés à l’article 27 doivent tenir à la disposition de la Cour, six mois suivant la clôture de l’exercice et pendant cinq années, leurs budgets, bilans, comptes de résultats et tous les documents comptables et extra comptables ayant permis de les établir.
Les procès verbaux des conseils d’administration et de surveillance, des comités de direction, des assemblées générales ordinaires ou extraordinaires, les circulaires internes, les audits ou expertises réalisés ainsi que les rapports des commissaires aux comptes sont conservés pendant cinq ans à la disposition de la Cour.

Article 70 : La Cour des comptes, statuant en matière de comptabilité publique, est chargée également du contrôle administratif des comptes de matières des administrations publiques. Elle rend une décision particulière sur chaque compte individuel de matières. Elle produit également une déclaration de conformité attestant la concordance de l’ensemble des comptes individuels de matières avec les comptes généraux des ministères.
Dans les services et organismes qui tiennent des comptabilités de matières un rapport sur la gestion de ces matériels retraçant les opérations effectuées dans l’année, l’utilisation des stocks, leur renouvellement, les pertes constatées et les responsabilités encourues est adressé à la Cour par l’autorité compétente.

Article 71 : La Cour peut entendre, sur ordonnance de son président, tout fonctionnaire, tout gestionnaire de fonds et de biens publics ainsi que tout membre d’un corps de contrôle.
L’ordonnance est transmise par la voie hiérarchique. En cas d’urgence, la Cour notifie directement l’ordonnance et en avise alors le supérieur hiérarchique de l’intéressé.

La Cour peut entendre également toute personne concernée directement ou indirectement par l’affaire examinée dans les formes prévues à l’article 30 de la présente loi.

Article 72 : Si la Cour découvre, lors d’un contrôle des faits qui relèvent de ses compétences en matière de discipline financière, elle s’en saisit directement en application des dispositions de l’article 55 de la présente loi.

Article 73 : Le rapporteur procède à l’examen des états financiers, notamment bilans et documents annexes et en tire toutes les conclusions sur les résultats et la qualité de la gestion. Il établit un pré-rapport qui est communiqué par le président de chambre aux dirigeants du service ou de l’organisme contrôlé qui doivent répondre dans le délai d’un mois, par mémoire écrit. Ce mémoire est à la fois transmis au rapporteur et au magistrat contre-rapporteur.
Le dossier complet est ensuite transmis au commissaire du Droit pour ses conclusions.
A l’issue de cette procédure, la chambre concernée, après audition des parties s’il lui paraît nécessaire d’éclaircir certains points, arrête définitivement le rapport dans lequel elle exprime son avis sur la régularité et la sincérité des comptes, propose le cas échéant les redressements qu’elle estime nécessaires, les sanctions qui paraissent s’imposer et porte un avis sur la qualité de la gestion. Elle signale enfin les modifications qui lui paraissent devoir être apportées à la structure ou à l’organisation de l’organisme contrôlé.
Après délibération, si la chambre a constaté des irrégularités dues aux administrateurs, relevé des lacunes dans la réglementation ou des insuffisances dans l’organisation administrative et comptable, elle informe, par voie de référé du président de la Cour, les dirigeants des organismes contrôlés, les ministres intéressés ou les autorités de tutelle et leur demande de faire connaître à la Cour les mesures prises en vue de faire cesser les errements constatés.
Dans chaque ministère, un fonctionnaire de l’administration centrale dont la désignation est notifiée à la Cour, est chargé de veiller à la suite donnée aux référés.

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CHAPITRE VIII
Dispositions transitoires et finales

Article 74 : Les arrêts de la Cour des comptes sont rendus au nom du peuple sénégalais. Les arrêts et actes de la Juridiction sont signifiés par exploits d’huissier.
Les arrêts et actes de la Juridiction sont dispensés de la formalité du timbre et de l’enregistrement, ainsi que leurs ampliations ou expéditions.

Article 75 : La Cour et les magistrats sont protégés, conformément aux dispositions de la Constitution, du code pénal et des lois particulières en vigueur, contre les menaces, outrages, attaques, injures et diffamations dont ils pourraient être l’objet.

Article 76 : Le président de la Cour des comptes peut requérir l’assistance de la force publique pour assurer la protection de la Cour et de ses magistrats dans l’exercice de leurs fonctions, le bon déroulement de leurs missions et la sauvegarde des bâtiments et archives.

Article 77 : A titre exceptionnel, lors de la création de la nouvelle Cour des comptes, le président de la Cour, tous les magistrats et le nouveau commissaire du Droit prêtent serment, conformément à l’article 11 de la présente loi, même s’ils ont déjà prêtés serment dans une fonction précédente.

Article 78 : Les procédures engagées devant la Cour interrompent toute prescription des actions pouvant se rapporter aux comptes ou aux affaires objet de ces procédures.

Article 79 : Les conditions d’application de la présente loi seront en tant que de besoin fixées par décret.

Article 80 : Sont abrogées ou modifiées toutes les dispositions légales ou réglementaires contraires à celles de la présente loi et notamment, telles qu’elles ont été modifiées ou complétées :

– l’article 2 et le chapitre VI du titre III de la loi organique n°96-30 du 21-10-96 sur le Conseil d’Etat ;
– les articles 12, 342 et 343 de la loi n°96-06 portant code des collectivités locales, la  » Cour des comptes  » remplaçant la  » Section des comptes  » ou le  » Conseil d’Etat  » ;
– la loi n°98-20 du 26 mars 98 portant création de la Cour de discipline financière.

La présente loi organique sera exécutée comme loi de l’Etat.

Fait à Dakar, le 17 février 1999

Par le Président de la République Abdou DIOUF

Le Premier Ministre
Mamadou Lamine LOUM